Note de lecture – Démocratie. Histoire politique d’un mot aux Etats-Unis et en France
Je vous propose aujourd’hui une note de lecture sur un livre paru en 2019, qui est on en peut plus d’actualité. Ecrit par le chercheur canadien spécialiste des mouvements sociaux Francis Dupuis-Déri, "Démocratie. Histoire politique d’un mot aux Etats-Unis et en France" a l’immense intérêt de replacer les mots dans leur réelle définition et de retracer l’histoire récente du concept devenu bien obscur de "démocratie".
S’il y a un terme qui a été galvaudé par le marketing politique, c’est celui de démocratie. Francis Dupuis-Déri constate dans le livre Démocratie. Histoire politique d’un mot aux Etats-Unis et en France que la démocratie n’a pas grand-chose à voir avec le système représentatif actuel, et que dès l’origine des Républiques il n’a jamais été question de démocratie. Le pouvoir est passé du Roi à un Président, les privilégiés ont récupéré le pouvoir et le peuple n’a toujours pas son mot à dire en dehors du vote. Et le vote c’est confier à d’autres que soi la capacité de décider de son avenir, ce n’est pas cette démocratie qui fait si peur aux privilégiés qui tiennent les rênes du pouvoir : à Athènes lors des courtes périodes démocratiques, c’est par tirage au sort que les citoyens désignaient leurs représentants [1].
"Comment expliquer que le régime électoral libéral soit aujourd’hui perçu comme l’ultime modèle "démocratique", alors qu’il a été fondé par des antidémocrates déclarés ? Et comment expliquer ce changement de sens vers le milieu du XIXe siècle, à la fois concernant l’objet désigné par le mot "démocratie" (régime électoral plutôt que régime d’assemblées du peuple) et la valeur de ce mot, qui est passée de négative (un régime détestable et détesté) à positive (le meilleur des régimes politiques) ?" s’interroge l’auteur en introduction.
Quand la démocratie est réduite à un argument politique
Depuis des siècles, le peuple est perçu comme une chose à gérer, à contenir, voire à discipliner. La Révolution, aux Etats-Unis comme en France, n’a pas changé l’ordre des choses : elle a simplement supprimé le pouvoir monarchique.
Si la Révolution en France a bien été le fruit d’une poussée populaire, la dynamique a vite été récupérée et accaparée dès la création d’une assemblée constituante. Les bourgeois qui tenaient le Tiers-Etat [2] ont voulu instaurer une "République" et non une "démocratie", perçue comme une fureur révolutionnaire populaire, rappelle Francis Dupuis-Déri. L’ "union de tous les français" ne pouvait selon eux se faire que sous un régime centralisé et pyramidal, dans lequel les bourgeois décideraient seuls des affaires de la nation. Le peuple ne s’y est pas trompé, et s’est très vite mis à réclamer des droits politiques, dans un contexte où l’inflation courait et où les conditions de vie étaient désastreuses.
Il n’était pas question de "démocratie" en 1789. L’option d’une République permettait de transférer le pouvoir monarchique à un gouvernement élu par une petite élite privilégiée, tout en contrôlant les pulsions démocratiques du peuple. Comme le disait Emmanuel-Joseph Sieyès, la France est "un Etat représentatif" parce que les citoyens se nomment des représentants et ne dictent pas leur volonté, sinon ce serait une démocratie [3]. Aux Etats-Unis non plus, l’heure n’était pas à la démocratie, et la volonté était de maintenir l’ordre établi, inégalitaire, et l’entre-soi dans la gestion des affaires.
Ce n'est que vers 1830, une période de fortes revendications sociales et politiques, marquée par l’industrialisation de masse dans les villes, que le terme de "démocratie" a été jugé intéressant pour la communication politique, mais pour décrire le même système pyramidal et centralisé dans lequel le peuple n’avait pas voix au chapitre (pour voter il fallait savoir lire, souvent être propriétaire et payer des impôts plus ou moins élevés selon les périodes).
Alors que la "démocratie" désignait un régime dans lequel l’ensemble des citoyens décide directement, en référence à l’Antiquité grecque, c’est à cette période que la définition du mot "démocratie" a changé, vidant le concept de tout son sens. En faisant passer un régime pyramidal, centralisé et aristocratique pour de la "démocratie", on tuait à petit feu le débat politique, on étouffait durablement la parole du peuple et on l'éloignait de la politique. Le dévoiement des mots par les hommes politiques sert toujours à tromper le peuple, et Francis Dupuis-Déri cite le révolutionnaire français Elisée Loustalot (1761-1790) [4] : "l’abus des mots a toujours été un des principaux moyens qu’on a employés pour asservir les peuple". Pourquoi se battre pour la démocratie puisque nous y sommes ?
Les pères fondateurs de la "démocratie" américaine étaient tous des antidémocrates et s’affirmaient comme tels parce qu’ils défendaient la "République". La démocratie directe les effrayait comme elle effrayait les Républicains français [5], rappelle Dupuis-Déri. Pourquoi appeler aujourd’hui les Etats-Unis ou la France des "démocraties" ?
Pourtant, avant et pendant la Révolution française, des formes de démocratie directe étaient pratiquées lors d'assemblées dans des communes, dans des villages, dans les guildes professionnelles : tous ces dispositifs, déjà honnis par la monarchie, ont été dissous dans la République, l’Etat bourgeois prenant le pouvoir de décision sur toute la vie des habitants.
Les dominants ont vite compris que les lois voulues par le peuple n’étaient pas dans leur intérêt, par conséquent le pouvoir politique devait rester entre les mains de ceux qui savent prendre des bonnes décisions. C’est ainsi que la démocratie a été associée à l’anarchie, à la turbulence, à la débauche, au tumulte, qu’elle a été qualifiée d’effrayante, ou comme répondant à "des intérêts égoïstes" (comprendre : des intérêts qui ne sont pas ceux des dominants), pendant que les aristocrates et quelques bourgeois se revendiquaient "Républicains" [6]. Déjà dans l’Antiquité grecque, les dominants se méfiaient de la démocratie et de l’incontrôlable tirage au sort des représentants.
"Les républicains des temps modernes se méfiaient de la démocratie, tout comme des autres formes de régimes purs. La démocratie, dans le cadre du discours républicain, ne signifiait pas autre chose qu’un régime où le peuple assemblé à l’agora gouverne directement. Ce type de régime est dangereux, car il offre trop de pouvoir aux pauvres qui vont l’utiliser pour menacer la sécurité des riches, c’est-à-dire l’équilibre de la communauté. Même si le peuple cherche à défendre et promouvoir le bien com m un, son manque inhérent de rationalité et de vertu l’entraînera à prendre de mauvaises décisions politiques et la démocratie deviendra inévitablement tyrannique", écrit Francis Dupuis-Déri. Pour lui, cette peur panique du peuple relève d’une agoraphobie atavique des dirigeants.
Au fil du XIXe siècle, les termes de République et de démocratie sont devenus synonymes dans la bouche des acteurs politiques, alors que la République ne cessait de s’éloigner du concept de démocratie et bien que les citoyens n’étaient toujours pas associés aux décisions. Loin de là : le XIXe siècle a connu plusieurs révolutions, deux monarchies, deux Napoléon, preuve que le rapport de force n’était pas stabilisé. La fin du suffrage censitaire (basé sur l’impôt) n’est intervenue définitivement en France qu’en 1890, et les femmes ne votent même pas depuis un siècle. Il a fallu de hautes luttes pour remettre notre destin à des individus qui ne sont redevables de rien.
Aux Etats-Unis, l’assemblée représentant le peuple (la chambre basse), bien que cornaquée par un sénat représentant les aristocrates, a très vite fait l’objet d’attaques et ses pouvoirs ont été réduits. Idem avec les assemblées locales qui se tenaient au besoin dans les villes et villages depuis des années pour prendre des décisions, même si dans les grandes villes, les marchands et négociants y étaient très influents.
Ces assemblées étaient ouvertes sur base des critères financiers assez larges dans les campagnes, et même des Noirs libres ou des femmes pouvaient y voter en remplissant ces critères. A partir de 1789, l’élection du Président US était faite par des grands électeurs nommés par les notables locaux.
Et puis, si la République était la démocratie, pourquoi les monarchies s’y sont-elles si souvent converties ? En Angleterre, l’auteur rappelle que le roi "a donné au Parlement le droit de représenter la nation", et qu’avant même le scrutin universel direct, le Parlement était considéré par les représentant comme étant la nation : une décision du Parlement était donc une décision de "la nation". De la "pensée magique" selon Dupuis-Déri.
Le parlementarisme, un moindre mal
Francis Dupuis-Déri revient sur les épisodes "révolutionnaires" aux Etats-Unis et en France, conduits par des avocats, juristes, propriétaires terriens qui parlaient au nom "du peuple", qu’ils méprisaient pourtant. Et il est vrai qu’en France par exemple, aucun paysan n’a participé aux débats sur la forme de gouvernement [7].
Les révoltes populaires étaient de plus en plus courantes en Europe et en Amérique au fil du XVIIIe siècle, contre les impôts et le prix des produits de base le plus souvent, et elles ont continué après les "Révolutions" dans les différents pays : "Tous ces événements ont sans doute eu un impact sur le vocabulaire politique de l’époque, provoquant des débats au sujet des mots "sédition", "insurrection", "révolte" et "révolution", mais aussi "tyrannie" et "esclavage", observe l’auteur, qui s’appuie sur de nombreux écrits et prises de paroles des acteurs politiques de l’époque.
Les "révolutions" ont surtout entraîné le changement de la source de la légitimité politique : ce n’est plus Dieu qui le donne au monarque, mais le peuple qui le transfère à ses représentants. Et les postes administratifs n’ont plus été tenus par les nobles, mais par la nouvelle "noblesse de robe", diplômée. "À la recherche d’une légitimité, la nouvelle élite travailla le concept de nation en remplaçant l’idée d’une société divisée en trois ordres - les nobles, les clercs et la plèbe - par celle d’une nation unifiée", explique Francis Dupuis-Déri. Ce concept permettra de légitimer toutes les actions, même celles qui sont clairement contre le peuple, comme étant de l’intérêt de "la nation" et on a même décidé d’écrire un "roman national" français, ce catéchisme républicain censé raconter la grande Histoire de France.
L'agoraphobie des politiciens déjà professionnels a entraîné la dissolution progressive des assemblées populaires locales des deux côtés de l’Atlantique, et le blocage de toutes les revendications démocratiques. Car en France et aux USA, la démocratie était considérée comme un péril qui diviserait la nation, comme si prendre en compte l’intérêt des classes populaires allait menacer la cohésion, et comme si les riches devaient faire sécession s’ils n’obtenaient pas tout ce qu’ils voulaient.
Alors on a redéfini la démocratie comme un système représentatif dans lequel les citoyens ne gouvernent pas, surtout pas les femmes qui avaient pourtant déclaré leur opposition aux décisions prises sans elles. En Bretagne par exemple, il y a eu des assemblées populaires entre 1790 et 1795, qui réunissaient les citoyens pour parler de l’administration, de la police, de la justice, de la guerre, de la répression, d’agriculture, de commerce, d’instruction publique, des arts, des cultes, de santé et d’hygiène, des sciences…
Le peuple était toujours infantilisé, considéré par les bourgeois et les aristocrates comme irrationnel et incapable de prendre des décisions cohérentes. Il était donc tout naturel qu’on décide à sa place. Depuis 1789, cette caste politique s’est constituée et renforcée pour gérer les leviers du pouvoir sans intervention du peuple, entretenant le mythe de "la démocratie représentative" alors que le tirage au sort est bien plus démocratique. Et aujourd’hui, les mêmes politiciens considèrent que la démocratie se limite à voter de temps à autre pour eux, sans qu’ils n’aient aucun compte à rendre.
Ces représentants ont mis en place la République en prenant le soin de ne pas l’appeler aristocratie (le gouvernement par quelques-uns, s’estimant "les meilleurs") ou monarchie républicaine (gouvernement par un seul), "Or, dans leurs écrits plus intimes, comme leurs journaux personnels ou leur correspondance privée, certains s’avancent à appeler "aristocratie élective" le régime qu’ils désignent publiquement comme une "république"", écrit Francis Dupuis-Déri. En 1813 par exemple, Thomas Jefferson écrivait ainsi à John Adams qu’il "y a une aristocratie naturelle, fondée sur le talent et la vertu, qui semble destinée au gouvernement des sociétés, et de toutes les formes politiques, la meilleure est celle qui pourvoit le plus efficacement à la pureté du triage de ces aristocrates naturels et à leur introduction dans le gouvernement".
Le concept de République n’implique pas la souveraineté du peuple mais c’est comme cela qu’il a été utilisé par la bourgeoisie : le peuple n’est pas souverain, il est "représenté". Il ne décide pas, il élit des individus qui ne sont redevables de rien. A partir de 1793 en France, un courant "Républicain" s’est affirmé, en opposition notamment avec la "démocratie" perçue de manière péjorative.
Les riches contre la démocratie
C’est le titre d’un chapitre du livre. Francis Dupuis-Déri rappelle à quel point les privilégiés étaient effrayés de la "sédition", des rassemblements de citoyens sur les places publiques (surtout pas d’agora !) : Dupuis-Déri cerne ce phénomène d’agoraphobie politique. Tout a été fait pour empêcher les citoyens de s’organiser, d’échanger, de construire des idées et revendications politiques. Des lois ont été passées pour empêcher les ouvriers de se réunir : dès 1791 en France, la loi Le Chapelier interdisait au nom de l'unité nationale tout groupement professionnel, en ciblant en réalité les ouvriers et les paysans, ainsi que les grèves. Cette loi est restée en vigueur un siècle (les syndicats n'ont été autorisés qu'en 1884 par la loi Waldeck-Rousseau).
Alors qu'une démocratie supposerait une égalité des droits entre les individus et leur implication à parts égales dans la gestion de la cité, la République ressemblait davantage à une oligarchie ou à un système aristocratique.
Depuis 1789, chaque poussée populaire a été réprimée et suivie d’une forte réaction bourgeoise, par exemple en 1791 quand le peuple à Paris demande la déchéance du roi et la République, l’Assemblée constituante et la commune de Paris font tirer sur la foule au champ de Mars et instaurent la loi martiale. Un peu plus tard, la Convention en 1793 a marqué un summum de l’autoritarisme de cette classe privilégiée contre le peuple en organisant ce qu’on a appelé la "Terreur" avec sa succession de massacres. En 1793 a aussi été rédigée la constitution la moins antidémocratique en France.
Aux Etats-Unis, avant même l’Indépendance, les bourgeois s’inquiétaient des revendications entendues dans des assemblées de citoyens ici et là, pour un système démocratique au lieu d’un système aristocratique. Certains s’interrogeaient même sur ce qui devait primer entre la personne humaine et la propriété privée, ou sur une limite à la propriété privée… Ce mouvement égalitariste émergent devait être anéanti au besoin par les armes. D’autres qui allaient jusqu’à réclamer l’égalité de traitement, l’égalité d’accès à la décision politique, étaient taxés de "démocrates" par les bourgeois. En 1791, ces bourgeois s’inquiétaient de nouvelles revendications "révolutionnaires" attaquant la propriété privée.
Pendant ce temps, les riches, eux, s’organisaient. Ils se réunissaient, définissaient des stratégies pour conserver le pouvoir et écraser les salaires. Ils s’octroyaient seuls la compétence politique et la vertu, empêchant les citoyens d’avoir des espaces de discussion. Au Parlement, la classe de juges, d’avocats, de commerçants qui était majoritaire, partageait les intérêts de la grande bourgeoisie afin de se maintenir en place. Et beaucoup, dans le peuple, considéraient que c’était là l’ordre naturel des choses.
In fine, les Etats-Unis et la France ont choisi un régime avec une sorte d’équilibre des pouvoirs, afin d’éclater les pouvoirs et de limiter ceux de l’assemblée censée représenter "le peuple". Un Sénat ultra-conservateur qui n’est pas élu directement par les citoyens, défendant la bourgeoisie et la propriété privée a été ajouté (la "chambre des riches"), pour bloquer toutes les lois attaquant la propriété privée et les bourgeois. Aux Etats-Unis, le Sénat a clairement été créé pour contrebalancer l'assemblée censée être "le grand dépositaire des principes démocratiques du gouvernement". Et de toute manière, "il n’y a aucune référence à la démocratie dans la Déclaration d’indépendance de 1776 et dans la Constitution fédérale des Etats-Unis de 1787", souligne Dupuis-Déri dans le cas des Etats-Unis Le terme n’apparaît pas non plus dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
D’ailleurs, l’Indépendance des Etats-Unis n’a pas davantage été une révolution qu’en France puisque rien n’a changé dans les lois, que les intérêts de bourgeois ont été préservés et que leur pouvoir a même augmenté du fait de la séparation d’avec la couronne britannique. La structure sociale de la société n’a pas changé excepté la fin de la mise en esclavage pour dettes, et en France même la monarchie a été conservée sur le principe jusqu’en 1792. Mais dans certains Etats américains, des paysans et artisans sont entrés dans les assemblées, notamment en Pennsylvanie, qui s’est dotée en 1776 d’une Constitution qualifiée de "dictature du prolétariat" par l’historien de droite Samuel Eliot Morison (elle sera abolie dès 1791) [8]. Dans le Massachusetts, une nouvelle Constitution a restreint le droit de vote et de se faire élire, interdisant de fait des assemblées populaires déjà en place.
La création d’un gouvernement central qui fédéralise les différents Etats est apparue comme une solution pour contrer l’influence des assemblées et freiner la "démocratie" - on peut relever que c’est aussi là l’objectif de "l’Europe". Pour Dupuis-Déri, la fondation des Etats-Unis en 1787 est un acte clairement anti-démocratique : "Les fédéralistes déclaraient ouvertement que leur projet d’union permettrait d’endiguer la démocratie qui se développait de manière chaotique depuis l’indépendance. Les fédéralistes ont aussi tôt fait de considérer les anti fédéralistes comme de dangereux démocrates. Ces délégués mentionnaient la démocratie en référence aux années qui avaient suivi directement l’indépendance, marquées selon eux par des turbulences et un esprit égalitariste." La Constitution ne sera pas soumise au vote populaire, car ç’eût été "trop démocratique" : ce sont les représentants de chaque Etat qui ont voté. On ne sera pas étonnés que le Parti fédéraliste, créé autour d'Alexandre Hamilton (1er secrétaire au Trésor des USA) vers 1789 et très puissant à cette époque, était un parti de banquiers, de marchands et de patrons d'industrie qui voulaient créer une armée et une marine.
Le Sénat jouait un rôle central dans le blocage des revendications populaires, comme en Angleterre. Comme en France où il n'a été créé qu'en 1795 sous le nom de "Conseil des Anciens", il n’est pas élu par les citoyens et n'existe que pour défendre les intérêts de la bourgeoisie. "L’objectif des fédéralistes était de créer un système politique dans lequel l’assemblée législative serait sous le contrôle du Sénat qui devait la tempérer. Plusieurs délégués répétaient que le Sénat aurait pour objectif de contrôler la démocratie", analyse Francis Dupuis-Déri. D’ailleurs, en France dans un contexte où on nous dit qu’il faut faire des économies, une priorité est de supprimer le Sénat qui n’a aucune utilité politique et coûte plus d’un milliard d’euros tous les trois ans.
Pour faire passer la manœuvre, les bourgeois n’ont cessé de parler de la "souveraineté du peuple", qui leur donnerait la légitimité pour agir contre lui : "Cette propagande de la représentation a plusieurs avantages. Elle sert de justification au représentant lui-même, qui peut se convaincre que son engagement politique est plus juste (plus pur) que celui de ses adversaires. Il saura en effet souligner certaines de ses décisions comme servant plus explicitement les intérêts du peuple que ses ennemis monarchistes ou libéraux. Cette propagande sert aussi, évidemment, à faire croire au peuple que les dirigeants (le) gouvernent pour son bien. Glorifier le peuple en le déclarant souverain est une façon efficace de le séduire. Dans la perspective de l’agoraphobie politique, le peuple est d’ailleurs perçu comme aisément manipulable et facile à séduire.".
Ces gens n’hésitent pas à parler au nom du peuple d’où ils tireraient leur légitimité de "représentants" mais refusent absolument de lui rendre des comptes, et encore plus que le peuple décide de son avenir. Ils ont tout fait pour l’écarter durablement du pouvoir et des processus de décision.
Normaliser le système anti-démocratique
Très vite, les partis politiques sont arrivés et ont permis de verrouiller le système en institutionnalisant la cooptation des représentants politiques, avec un "parti Républicain" créé par Thomas Jefferson, qui se présentait comme une opposition aux aristocrates et aux fédéralistes. Des clubs politiques se sont créés en même temps pour s’opposer au fédéralisme, considéré comme éloignant le pouvoir des Etats, mais la plupart des membres étaient issus des classes aisées.
Francis Dupuis-Déri rappelle : "Vers 1793, les partis politiques font leur apparition dans la vie politique des États-Unis, malgré l’opinion largement répandue qu’ils allaient accroître la fragmentation de la société. À noter que les partis politiques sont alors des regroupements informels d ’acteurs politiques aux intérêts similaires, appuyés par quelques journaux."
En France, les clubs politiques qui ont œuvré pour détourner la Révolution se sont transformés en partis politiques, mais les assemblées populaires, dans les quartiers des villes et les villages, restaient un lieu de débat politique populaire. Les questions économiques, comme la régulation des prix, la spéculation, le marché libre, étaient aussi discutées, et ces assemblées étaient généralement opposées à l’assemblée "nationale" et aux politiciens de Paris. Les assemblées de quartier, les "sections", étaient considérées comme une menace pour "le régime représentatif", d’autant que certaines de ces assemblées, comme à Marseille dès 1789, se sont déclarées "permanentes". Quelques mois après la prise de la Bastille, les droits politiques des hommes –les femmes étant déjà exclues- se sont limités à pouvoir voter pour des bourgeois qui ne sont redevables de rien.
Un violent débat a ainsi eu lieu au sujet du mandat impératif : on élit sur base d’un mandat, duquel le représentant ne peut s’écarter. Ce n’est pas comme un député qui fait ce qu’il veut ou ce que veut son parti. Francis Dupuis-Déri précise que "le mandat impératif apparaissait comme un affront aux politiciens élus, qui voulaient conserver la liberté de délibérer et de voter sans tenir compte de la volonté de leur électorat. À l’inverse, les partisans du mandat impératif y voyaient une protection contre l’autoritarisme et une assurance que la souveraineté du peuple ne serait pas dévoyée". L’auteur revient sur les arguments des uns et des autres, qui montrent que les citoyens se sont très vite opposés aux politiciens parce qu’ils voulaient décider à leur place. Est-il question de mandat impératif aujourd’hui ? Ou de révocation des élus et fonctionnaires par les citoyens ? En réalité aucun marqueur de la démocratie n’existe aujourd’hui en France.
Les réflexions sur le fonctionnement d’un système démocratique, par le système des mandats notamment, étaient très intéressantes et sont toujours d’actualité. Les bourgeois ont essayé d'effacer le conflit social et politique, ce qui ne peut déboucher que sur des conflits violents, par la rue, par la révolution.
La Révolution n’a pas été linéaire : si elle a commencé à la suite de mouvements populaires, elle a été monopolisée par la bourgeoisie et l’aristocratie. Il y a eu plusieurs Constitutions, et celle qui était la plus avancée sur le plan de la démocratie, celle de 1793 qui garantissait le droit à l’insurrection, n’a jamais été appliquée à cause d’un coup d’Etat bourgeois, qui a fini avec le Directoire puis la Terreur qui visait les contre-révolutionnaires, nombreux dans la population. Les politiciens s’entre déchiraient déjà, c’était le début du "girouettisme" et certains avaient déjà changé plusieurs fois de camp en 1794. Finalement, Napoléon arrivé en 1799 a instauré durablement un ordre bourgeois et capitaliste.
Les femmes ont été éjectées de la vie politique, et avaient même l’interdiction de se réunir pour parler entre elles de politique, au prétexte que leur rôle naturel est de rester à la maison. Un député a même admis que "les sociétés de femmes sont dangereuses [et] funestes à la tranquillité publique" (comprendre : celle des bourgeois). En 1793, les bourgeois leur ont aussi interdit de s’assembler dans la rue. Les hommes du peuple ont laissé faire, et ont subi très vite le même genre de "lois". Puis, ajoute l’auteur, "Le dictateur Napoléon Bonaparte scellera leur sort avec l’article 1124 de son Code civil, où il est précisé que "[l]es personnes privées de droits juridiques sont les mineurs, les femmes mariées, les criminels, les débiles mentaux".
Robespierre, à la tête du Comité de Salut Public qui a fait régner la terreur dans les villes et les provinces, disait défendre la démocratie. Lui et ses amis n’utilisaient ce mot que pour justifier la répression sanglante qu’ils ont organisée et dont ils seront aussi victimes.
Aux Etats-Unis, pour conserver la main, les députés "nationaux" ont tout fait pour empêcher le fédéralisme : il fallait que leurs décisions s’imposent à tous, et on a développé le concept jacobin de "France une et indivisible", un mythe absolu qui avait pour seul objectif d’imposer l’ordre bourgeois. Les défenseurs du fédéralisme ont été violemment réprimés, certains ont même été assassinés.
A un moment, quelques années après la Révolution et l’Indépendance US, on a inventé le concept de "démocratie représentative", conçu comme un moins-disant démocratique mais mieux que la monarchie, qui s'est imposé au fil du temps. C’est le même système que la république définie jusque-là, mais on l’a appelé "démocratie représentative" parce que ça passait mieux auprès de la population, dont une partie, variable selon les périodes, pouvait voter. Montesquieu par exemple disait clairement les choses : "Comme la plupart des citoyens, qui ont assez de suffisance pour élire, n’en ont pas assez pour être élus ; de même le peuple, qui a assez de capacité pour se faire rendre compte de la gestion des autres, n’est pas propre à gérer par lui-même".
Les arguments de la bourgeoisie sont présentés par Francis Dupuis-Déri, et ils résonnent quand les politiques d’aujourd’hui considèrent que les citoyens "ne sont rien", qu’ils sont "illettrés", voire ne sont même pas des citoyens s’ils refusent une injection expérimentale. Et petit à petit en France, à l’instar d’Emmanuel-Joseph Sieyès (qui a instauré le suffrage censitaire), les antidémocrates d’hier se sont revendiqués plus démocrates que le concurrent, le système des bourgeois est devenu "la démocratie" (gage de légitimité) et l’ordre établi pouvait demeurer au prix de la marginalisation voire par moments de l’élimination de ceux qui n’étaient pas d’accord.
Le XIXe siècle connaîtra deux Napoléon, deux monarchies, trois importantes révolutions populaires, des restrictions et élargissements continuels du droit de vote. On a organisé une "école républicaine", devenue obligatoire en France en 1882, où on racontait la fable de la république démocratique et la croyance dans l’ascension sociale par l’école aux enfants.
Aux Etats-Unis, les candidats politiques du début du XIXe siècle sont devenus des spécialistes du marketing politique, et certains, opposés à ceux qui se réclamaient "républicains", se sont dits "démocrates" pour marquer une différence qui n’était en réalité que cosmétique. Même le parti Républicain créé par Thomas Jefferson, est devenu "parti démocrate", rappelle l’auteur. Dans la bouche des politiciens bourgeois, les mots n’ont plus de sens, et même le peuple se satisfait de ce "droit niais et puéril de choisir [ses] maîtres" [9].
En même temps que la République était travestie en démocratie, Dupuis-Déri explique que d’autres termes sont apparus à gauche, comme "socialistes", "communistes", "anarchistes", ces derniers poursuivant le combat pour la démocratie.
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Francis Dupuis-Déri constate in fine : "Il a suffi d’à peine deux ou trois générations pour que le m ot « démocratie », qui signifiait depuis deux mille ans le gouvernement du peuple par le peuple, en vienne à désigner un régime politique où une poignée de politiciens élus prennent les décisions au nom du peuple. Si le droit de voter et d ’être élu s’est élargi pour les hommes, au point où l’on parle de suffrage "universel", ces électeurs n’ont pas plus qu’avant le droit de participer directement à l’élaboration des lois et le pouvoir est toujours entre les mains de quelques centaines de politiciens élus."
Enfin, la démocratie aussi a ses limites. Sans une population éduquée et capable d’esprit critique, elle n’est qu’une dictature d’une majorité, facilement manipulable : il lui faut donc des garde-fous. De plus, sans espace public pour échanger et parler de politique, sans agoras, et sans espace public de construction de la politique, il n’y a pas de démocratie. Rappelons quelques dates:
l’école gratuite et la liberté d’expression ne sont arrivées qu’en 1881,
les syndicats n’ont été autorisés qu’en 1884
le droit de manifester en 1935 (de manière très encadrée toutefois),
le droit de vote des femmes en 1945,
le droit pour elles d’avoir un compte en banque date de 1965.
Si ces droits furent particulièrement tardifs, et si on n’a toujours pas le mandat obligatoire, la possibilité de révoquer les "élus" ou le référendum obligatoire d’initiative populaire, c’est parce que ce ne sont pas du tout des priorités de la République bien qu’il s’agisse de fondamentaux pour une "démocratie".
J’ajouterai que quand un président financé par un dictateur nie le résultat d’un référendum sur l’Europe en imposant sa décision, quand un président dissout l’assemblée, convoque les français aux urnes, et met au gouvernement les partis perdants pour bloquer la gauche et poursuivre sa politique désastreuse au service du capital, on n’est clairement pas dans un système démocratique, ni même républicain, mais dans l’autocratie : un individu concentre dans les faits tous les pouvoirs. Il faut appeler un chat, un chat et tirer les conséquences. Une autocratie décomplexée qui devient, évidemment, de plus en plus autoritaire.
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Je laisse ici des extraits du texte de l’anarchiste Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865), Solution du problème social écrit en 1848 (année de fortes tensions sociales et politiques) , qui est dans l’ensemble pertinent, au sujet de la souveraineté du peuple et de sa place en République. Il considère que "la démocratie est une aristocratie déguisée", et met en garde contre des chimères comme le droit de vote, le suffrage universel, l’assistanat au lieu de changer le système…
"Le Peuple souverain n’est obligé qu’envers lui-même. Nul ne traite avec lui d’égal à égal : et lorsqu’il se lève pour sa dignité offensée ou compromise, il est absurde de demander si cette manifestation du Peuple est légale ou illégale. Une constitution n’est point un contrat synallagmatique entre Roi et Peuple, entre législateurs et citoyens, entre mandans et mandataires. C’est le système par lequel le Peuple, l’homme collectif, organise éternellement ses fonctions, équilibre ses pouvoirs.
Le Peuple donc, lorsqu’il apprend que sa liberté est en péril, et que le moment est venu pour lui de résister, ne comprend, ne peut comprendre qu’une chose : c’est qu’à lui appartient non pas de protester, mais de décider souverainement. Ils étaient bien ignorans, en vérité, des droits du Peuple et de sa logique, ceux-là qui, prenant pour exemple l’Angleterre (toujours l’Angleterre !) invitèrent le Peuple à venir avec eux signer une protestation contre la politique du Gouvernement. Protester ! grand Dieu ! c’était abdiquer. Le Peuple n’a pas besoin d’huissier pour signifier sa volonté ; il l’exprime par des actes. Quand il s’assemble, il entend que c’est lui qui juge et qui exécute.
(…) Puisque, suivant l’idéologie des démocrates, le Peuple ne peut se gouverner lui-même, et qu’il est forcé de se donner des représentans qui le gouvernent par délégation et sous bénéfice de révision, on suppose que le Peuple est tout au moins capable de se faire représenter, qu’il peut être représenté fidèlement. — Eh bien ! cette hypothèse est radicalement fausse ; il n’y a point, il ne saurait y avoir jamais de représentation légitime du Peuple. Tous les systèmes électoraux sont des mécaniques à mensonge : il suffit d’en connaître un seul, pour prononcer la condamnation de tous.
(…) Ainsi la Révolution, suivant les uns, n’est qu’un accident, qui ne doit changer rien à l’ordre général de la société. Suivant les autres, la Révolution est sociale encore plus que politique. Comment satisfaire à des prétentions si manifestement incompatibles ? comment donner en même temps la sécurité à la bourgeoisie et des garanties au prolétariat ? comment ces vœux contraires, ces tendances opposées, viendront-elles se fondre dans une commune résultante, dans la loi une et universelle ?
Bien loin que la démocratie puisse résoudre cette difficulté, tout son art, toute sa science est de la trancher. Elle fait appel à l’urne ; l’urne est tout à la fois le niveau, la balance, le critérium de la démocratie. Avec l’urne électorale, elle élimine les hommes ; avec l’urne législative, elle élimine les idées.
(…) Je conviens que le nœud de la difficulté consiste à faire parler et agir le Peuple comme un seul homme. La République, selon moi, n’est pas autre chose ; et c’est là aussi tout le problème social. La démocratie prétend résoudre ce problème par le suffrage universel appliqué dans la plus grande largeur, soit la substitution de l’autorité de la multitude à l’autorité royale. C’est pour cela qu’elle s’appelle Démocratie, gouvernement de la multitude.
(…) Et cette loi, expression de quelque volonté fantasque sera réputée expression de la volonté du Peuple ! Il faudra que je m’y soumette, que je la défende, que je meure pour elle ! Je perds, par un caprice parlementaire, le plus précieux de mes droits, je perds la liberté ! Et le plus saint de mes devoirs, le devoir de résister à la tyrannie par la force, tombe devant la boule souveraine d’un imbécile !
La démocratie n’est autre chose que la tyrannie des majorités, tyrannie la plus exécrable de toutes ; car elle ne s’appuie ni sur l’autorité d’une religion, ni sur une noblesse de race, ni sur les prérogatives du talent et de la fortune : elle a pour base le nombre, et pour masque le nom du Peuple.
(…) Le choix des capacités, le mandat impératif, la révocabilité permanente, sont les conséquences les plus immédiates, les plus incontestables du principe électoral. C’est l’inévitable programme de toute la démocratie.
Or, la démocratie, pas plus que la monarchie constitutionnelle, ne s’accommode d’une pareille déduction de son principe.
Ce que demande la démocratie, comme la monarchie, ce sont des députés muets, qui ne discutent pas, mais qui votent ; qui, recevant le mot d’ordre du gouvernement, écrasent de leurs bataillons épais les opposants.
Ce sont des créatures passives, j’ai presque dit des satellites, que le danger d’une révocation n’intimide pas, dont la raison ne soit pas trop rebelle, dont la conscience ne recule devant aucun arbitraire, devant aucune proscription.
(…) Quoi qu’on fasse et quoi qu’on dise, le suffrage universel, témoignage de la discorde, ne peut produire que la discorde. Et c’est avec cette misérable idée, j’en ai honte pour ma patrie, que depuis 17 ans, on agite le pauvre Peuple ! C’est pour cela que bourgeois et travailleurs ont chanté en chœur la Marseillaise dans 70 banquets, et, après une révolution aussi glorieuse que légitime, se sont abandonnés à une secte de doctrinaires ! Six mois durant, les députés de l’opposition, comme des comédiens en congé, ont parcouru la province, et pour fruit de leurs représentations à bénéfice, à la place du privilège politique, ils nous ont rapporté, quoi ? l’agrariat politique ! C’est sous ce drapeau scissionnaire que nous prétendons conserver l’initiative du progrès, marcher à l’avant-garde des nations dans les conquêtes de la liberté, inaugurer l’harmonie sur le globe ! Hier, nous regardions avec pitié les Peuples qui n’avaient pas su, comme nous, s’élever aux sublimités constitutionnelles. Aujourd’hui, tombés cent fois plus bas, nous les plaignons encore, nous irions avec cent mille baïonnettes leur faire partager avec nous les bienfaits de l’absolutisme démocratique.
(…) Dès le lendemain de la Révolution, la démocratie et la République, comme si elles se fussent dit un éternel adieu, se séparaient. Les hommes politiques, les notabilités de la science, du barreau et de la presse, prirent pour eux la démocratie."
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[1] L’élection était considérée comme oligarchique mais peu à peu les élus prenaient le pas sur les tirés au sort, et on revenait vers un système oligarchique.
[2] L’assemblée convoquée par le Roi en 1789 comportait 3 ordres : clergé, noblesse, tiers-état. Chaque ordre avait 1 voix. Le Tiers-état était censé représenter le peuple mais comme le rappelle Francis Dupuis-Déri, cet ordre "comprend principalement des avocats, des juristes et quelque 13 % de "capitalistes", soit des marchands, des manufacturiers ou des banquiers. Des nobles et des clercs s’y sentent plus à leur place qu’au sein de leur propre ordre, tels que le noble Mirabeau et l’abbé Emmanuel Sieyès. Plusieurs membres du Tiers État sont liés organiquement à l’Ancien Régime, puisqu’ils occupent des fonctions administratives ou judiciaires". C’est le tiers-état qui s’est déclaré assemblée nationale puis constituante, lançant ainsi la Révolution sans remettre en cause la monarchie dans un premier temps.
[3] "Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants." Discours du 7 septembre 1789.
[4] Loustalot a fait paraitre à partir de juillet 1789 le journal Les Révolutions de Paris.
[5] Francis Dupuis-Déri relate de nombreux arguments de ces Républicains pour refuser toute démocratie, de la versatilité du peuple à son ignorance.
[6] La République étant un système dans lequel les différentes forces politiques sont censées être représentées de manière équilibrée, avec une séparation des pouvoirs.
[7] Sur les 9 députés inscrits comme "paysans", les 9 étaient en fait des propriétaires terriens.
[8] Cette constitution de Pennsylvanie de 1776 précisait par exemple :
l'égalité entre les citoyens,
la liberté d'expression et la liberté de la presse ("Que le peuple a droit à la liberté de parole, d'écriture et de publication de ses opinions ; par conséquent, la liberté de la presse ne doit pas être restreinte"),
demandait la "frugalité" parmi d'autres qualités à ses "officiers et représentants",
évoquait pour les citoyens le droit de pétition et de se rassembler ("Le peuple a le droit de se réunir, de se concerter pour le bien commun, d'instruire ses représentants et de s'adresser au pouvoir législatif pour obtenir réparation de ses griefs, par voie d'adresse, de pétition ou de remontrance").
tous ces représentants étaient élus par l'ensemble des citoyens
l'absence d'emprisonnement pour les personnes endettées à moins d'une fraude avérée et tous les détenus pouvaient être libérés sous caution.
[9] Anselme Bellegarrigue, "Au fait, au fait ! !"





















Merci pour cette analyse !